Fertilité et santé thyroïdienne : les cibles TSH avant la conception
nov., 16 2025
Si vous essayez de tomber enceinte et que vous avez des problèmes de fertilité sans explication claire, votre thyroïde pourrait être la clé. Beaucoup de femmes ne savent pas que des niveaux de TSH légèrement élevés - même dans la « fourchette normale » - peuvent réduire leurs chances de concevoir et augmenter le risque de fausse couche. Ce n’est pas une question de maladie grave, mais d’ajustement fin. La thyroïde, cette petite glande en forme de papillon au cou, contrôle votre métabolisme, mais aussi votre cycle menstruel, l’ovulation et même la qualité des ovules. Et quand elle ne fonctionne pas comme il faut, la grossesse devient plus difficile, voire risquée.
Quelle est la bonne valeur de TSH avant la grossesse ?
La plupart des laboratoires considèrent que la norme pour le TSH est entre 0,4 et 4,5 mIU/L. Mais pour une femme qui veut tomber enceinte, cette norme ne suffit pas. L’Association Américaine de la Thyroïde (ATA) recommande depuis 2017 de maintenir le TSH en dessous de 2,5 mIU/L avant la conception. Pourquoi ? Parce que des études montrent que les femmes avec un TSH entre 2,5 et 4,5 mIU/L ont presque deux fois plus de chances d’avoir une infertilité non expliquée que celles avec un TSH inférieur à 2,5.
Un grand suivi de plus de 180 000 femmes a révélé que celles avec un TSH supérieur à 2,5 mIU/L avaient un risque accru de fausse couche, même si elles n’étaient pas encore enceintes. Ce n’est pas une alarme, mais une alerte. Votre corps a besoin d’un bon équilibre hormonal pour que l’ovulation se déclenche, que l’embryon s’implante, et que le placenta se développe correctement. La thyroïde joue un rôle central dans ce processus.
Et si vous avez une thyroïdite de Hashimoto ?
Si vous êtes diagnostiquée avec une thyroïdite de Hashimoto - une maladie auto-immune qui attaque la thyroïde - les choses sont encore plus délicates. Votre corps est déjà en mode de stress thyroïdien. Pendant la grossesse, vos besoins en hormone thyroïdienne augmentent de 30 à 50 %, surtout dans les premières semaines, avant que le bébé ne développe sa propre thyroïde. Pour cette raison, les experts recommandent de viser un TSH encore plus bas : entre 1,25 et 1,75 mIU/L avant la conception.
Beaucoup de femmes pensent que si leur TSH est à 3,0 mIU/L, c’est « normal ». Mais si vous avez des anticorps thyroïdiens (TPOAb), ce n’est pas suffisant. Même sans hypothyroïdie clinique, la simple présence de ces anticorps augmente le risque de fausse couche de 100 %. Heureusement, un traitement simple à base de lévothyroxine peut réduire ce risque de 45 %.
Comment faire pour atteindre ces cibles ?
La première étape est un test de TSH. Il faut le faire dès le début de votre recherche de grossesse, même si vous n’avez aucun symptôme. La fatigue, les cheveux qui tombent, les règles irrégulières ou les prises de poids inexpliquées peuvent être des signes subtils d’un problème thyroïdien. Ne les ignorez pas.
Si votre TSH est élevé, votre médecin vous prescrira de la lévothyroxine. C’est la seule forme d’hormone thyroïdienne recommandée avant et pendant la grossesse. Évitez les préparations à base de thyroïde de porc (comme l’Armor Thyroid) : elles sont instables et peuvent réduire les niveaux de T4, ce qui nuit au développement du cerveau du bébé.
Les ajustements de dose ne se font pas à l’aveugle. On commence souvent par 12,5 à 25 mcg de plus, puis on reteste le TSH après 4 semaines. Il faut environ 6 semaines pour que le corps absorbe complètement la dose. Ne sautez pas cette étape. Beaucoup de femmes voient leur TSH redescendre, puis remonter après la grossesse - parce qu’on n’a pas augmenté leur dose à temps.
Les erreurs courantes à éviter
La plus grande erreur ? Attendre d’être enceinte pour traiter la thyroïde. La plupart des femmes ne savent pas qu’elles ont un problème avant de tomber enceinte. Et quand elles le découvrent, c’est souvent trop tard. Une étude de 2019 a montré que seulement 37 % des femmes hypothyroïdiennes ont reçu une augmentation de dose de lévothyroxine dans les 6 premières semaines de grossesse. Or, c’est exactement à ce moment-là que le bébé a le plus besoin d’hormones thyroïdiennes.
Autre erreur : prendre la lévothyroxine avec le petit-déjeuner. La thyroxine est très sensible aux interactions. Elle doit être prise à jeun, avec un verre d’eau, et attendre au moins 30 minutes avant de manger. Si vous prenez du calcium, du fer ou des vitamines contenant du magnésium, attendez 4 heures. Sinon, votre corps n’absorbe pas la dose.
Et ne changez pas de marque de lévothyroxine sans en parler à votre médecin. Même si les principes actifs sont les mêmes, les excipients varient, et cela peut affecter l’absorption.
Qui doit se faire dépister ?
L’American Society for Reproductive Medicine (ASRM) recommande de tester le TSH chez toutes les femmes qui consultent pour une infertilité. Ce n’est pas une option. C’est une norme. Environ 15 à 20 % des femmes avec un problème de fertilité ont un TSH anormal. Et ce n’est pas rare : la thyroïdite auto-immune touche 10 à 15 % des femmes en âge de procréer, contre seulement 5 à 8 % dans la population générale.
Même si vous n’avez pas d’infertilité, mais que vous avez un antécédent familial de maladie thyroïdienne, que vous avez eu une fausse couche, ou que vous êtes âgée de plus de 35 ans, un test de TSH est une bonne idée. C’est un simple prélèvement sanguin. Le coût est faible - environ 20 à 30 euros - et les bénéfices sont énormes.
Les chiffres qui parlent
Un traitement bien suivi avant la grossesse peut vous faire économiser des milliers d’euros. Une grossesse compliquée par une fausse couche ou une naissance prématurée coûte en moyenne 7 200 euros. Le traitement par lévothyroxine, lui, ne coûte que 4 à 10 euros par mois. Une analyse économique montre que chaque grossesse bien préparée génère entre 1 850 et 2 400 euros d’économies en soins de santé.
Et si on généralisait le dépistage du TSH avant la conception dans tout le pays ? Selon le Global Thyroid Health Initiative, cela pourrait prévenir entre 65 000 et 80 000 fausses couches par an aux États-Unis seulement. C’est une intervention simple, peu coûteuse, et extrêmement efficace.
Et maintenant, que faire ?
Si vous êtes en projet de grossesse :
- Demandez un test de TSH, même si vous n’avez aucun symptôme.
- Si vous avez déjà un diagnostic de thyroïdite ou d’hypothyroïdie, demandez à votre médecin de vérifier votre TSH et de l’ajuster à moins de 2,5 mIU/L (ou 1,75 mIU/L si vous avez des anticorps).
- Ne prenez pas de lévothyroxine sans suivi médical. La dose n’est pas la même pour tout le monde.
- Prenez votre traitement à jeun, avec de l’eau, et attendez 30 minutes avant de manger.
- Revenez contrôler votre TSH tous les 4 à 6 semaines jusqu’à la conception, puis dès que vous êtes enceinte.
La fertilité n’est pas juste une question d’ovulation ou de spermatozoïdes. C’est un équilibre hormonal global. Votre thyroïde est un acteur majeur. Ne la négligez pas. Un petit ajustement aujourd’hui peut faire toute la différence pour une grossesse saine demain.
Le TSH doit-il être testé même si je n’ai pas de symptômes ?
Oui. Beaucoup de femmes avec un TSH élevé n’ont aucun symptôme évident. La fatigue, la prise de poids ou les règles irrégulières peuvent être attribuées à d’autres causes. Mais un TSH légèrement élevé peut nuire à la fertilité sans que vous vous en rendiez compte. Le dépistage est simple, peu coûteux, et peut changer votre parcours de grossesse.
Puis-je prendre de la lévothyroxine sans ordonnance ?
Non. La lévothyroxine est un traitement hormonal qui doit être prescrit et surveillé. Une dose trop élevée peut provoquer une tachycardie, une perte de masse osseuse, ou même des troubles du rythme cardiaque. Une dose trop faible ne protège pas la grossesse. Seul un médecin peut ajuster la dose en fonction de vos résultats de TSH et de votre historique médical.
Est-ce que le TSH change pendant la grossesse ?
Oui. Pendant la grossesse, les niveaux de TSH baissent naturellement au premier trimestre à cause de l’hormone hCG, qui agit comme une stimulation thyroïdienne. C’est pourquoi on ne teste pas le TSH au même moment qu’avant la grossesse. Après la conception, le TSH doit être surveillé tous les 4 semaines jusqu’à la 20e semaine, puis selon les besoins. Votre dose de lévothyroxine augmentera généralement de 25 à 50 %.
Et si mon TSH est normal, mais que j’ai des anticorps thyroïdiens ?
Même avec un TSH normal, la présence d’anticorps (TPOAb) augmente le risque de fausse couche. Dans ce cas, certains spécialistes recommandent une lévothyroxine à faible dose (25 mcg/jour) pour réduire ce risque. Cela n’est pas encore une recommandation universelle, mais c’est une pratique courante dans les centres de fertilité. Parlez-en avec votre endocrinologue ou votre gynécologue.
Quand dois-je revoir mon médecin après la conception ?
Dès que vous confirmez votre grossesse, rendez-vous chez votre médecin dans les 2 semaines. Votre dose de lévothyroxine devra probablement être augmentée. Le TSH doit être rétesté à la 4e semaine de grossesse, puis tous les 4 à 6 semaines jusqu’à la 20e semaine. Après cela, une vérification à la 30e semaine est souvent suffisante, sauf si votre historique est compliqué.