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Comment communiquer précisément sur l'utilisation des médicaments en vente libre et des compléments alimentaires

Comment communiquer précisément sur l'utilisation des médicaments en vente libre et des compléments alimentaires déc., 20 2025

Vous prenez un complément de vitamine D chaque matin, un anti-inflammatoire en vente libre pour vos douleurs articulaires, et une infusion de camomille le soir pour dormir. Vous pensez que ce sont des choses sans danger, sans lien avec vos médicaments sur ordonnance. Mais si votre médecin ne le sait pas, ces produits peuvent causer des réactions graves - voire mortelles.

Pourquoi cette information est cruciale

En 2022, plus de 78 % des Américains utilisaient au moins un complément alimentaire. En France, les chiffres sont similaires : près de 60 % des adultes en prennent régulièrement. Pourtant, seuls 36 % de ces personnes en parlent à leur médecin. Pourquoi ? Parce que beaucoup croient que « naturel » signifie « inoffensif ». Ce n’est pas vrai.

Les compléments alimentaires - vitamines, minéraux, herbes, probiotiques - ne sont pas régis comme les médicaments. Ils n’ont pas besoin d’être approuvés avant d’être vendus. Le fabricant peut mettre sur le marché un produit sans prouver qu’il est sûr ou efficace. Et pourtant, ces produits interagissent avec vos médicaments. Le Saint-Jean de l’herbe, par exemple, réduit l’efficacité de 37 médicaments sur ordonnance, y compris les anticoagulants, les antidépresseurs et les traitements du VIH. Le kava, utilisé pour réduire l’anxiété, a provoqué des insuffisances hépatiques mortelles chez des patients prenant des antipsychotiques. Et ce n’est qu’un début.

Les médicaments en vente libre ne sont pas plus inoffensifs. Un simple analgésique comme l’ibuprofène peut augmenter le risque de saignement si vous prenez aussi de l’huile de poisson à forte dose. L’acétaminophène, combiné à des extraits de thé vert, a provoqué des échecs hépatiques aigus. Selon les données de la FDA, 1 034 effets indésirables liés aux compléments ont été signalés en 2022 - dont 52 morts.

Comment bien documenter ce que vous prenez

La première règle : ne vous fiez pas à votre mémoire. Ne dites pas : « Je prends de la vitamine C. » Dites : « Je prends 500 mg de vitamine C, deux fois par jour, avec les repas, pour renforcer mon système immunitaire pendant l’hiver. »

Utilisez le formulaire officiel de l’Office des compléments alimentaires des NIH (National Institutes of Health) : My Dietary Supplement and Medicine Record. Il demande trois éléments essentiels pour chaque produit :

  • Nom exact du produit - pas « vitamine D », mais « Nature Made Vitamin D3 1000 IU »
  • Dosage et fréquence - « 20 mg de zinc, une fois par jour, le matin »
  • Raison d’utilisation - « pour prévenir les infections respiratoires » ou « pour soulager les crampes musculaires »
Ce formulaire est disponible en téléchargement gratuit sur le site du NIH. Imprimez-le, remplissez-le à la main ou sur votre téléphone, et apportez-le à chaque rendez-vous. Une étude de 2020 dans 12 cliniques primaires a montré que cette méthode réduit les erreurs de documentation de 64 % par rapport à un simple récit oral.

Différence entre médicaments et compléments : ne vous laissez pas tromper par les étiquettes

Sur une boîte de paracétamol, vous voyez un bandeau intitulé Drug Facts. Sur une gélule de curcuma, vous voyez Supplement Facts. Ces deux étiquettes ne signifient pas la même chose.

Le Drug Facts indique la dose thérapeutique, les effets secondaires connus, les contre-indications et les interactions avec d’autres médicaments - tout cela vérifié par la FDA. Le Supplement Facts ne montre que la quantité d’ingrédients par dose. Il ne dit pas si ces ingrédients sont sûrs en combinaison avec vos médicaments. Et pire : 23 % des étiquettes de compléments contiennent des informations fausses ou inexactes, selon un rapport du Government Accountability Office en 2022.

68 % des consommateurs pensent que ces deux types d’étiquettes sont équivalentes. Ce n’est pas le cas. Une étude de l’American Liver Foundation montre que 64 % des patients ne considèrent même pas les vitamines comme des « compléments » qui doivent être déclarés. Pour eux, ce sont juste des « vitamines ». Pour votre médecin, c’est un médicament potentiellement actif.

Les professionnels de santé doivent poser la question - et vous devez répondre

La plupart des médecins ne posent pas la question. Une étude de 2022 montre que 52,7 % des patients qui ne déclarent pas leurs compléments disent que leur médecin ne l’a jamais demandé. C’est un échec du système. Mais ce n’est pas seulement la faute du médecin.

L’American Medical Association recommande clairement : les professionnels doivent poser la question à chaque visite, pas seulement lors d’un bilan annuel. Et les patients doivent répondre - même si on ne le leur demande pas. La Consumer Healthcare Products Association rappelle que 28 % des patients vivent des interactions entre compléments et médicaments sans le savoir.

Les pharmaciens sont souvent plus efficaces que les médecins pour détecter ces interactions. Une étude de 2021 montre qu’ils identifient 3,2 fois plus de risques potentiels lors des revues de médicaments. C’est pourquoi, si vous avez un suivi médical régulier, demandez à votre pharmacien de faire un point complet sur vos médicaments - y compris les compléments - au moins une fois par an.

Pharmacien montre des interactions dangereuses entre un complément et un médicament sur un écran.

Les conséquences de ne pas parler

Un cas réel : une femme de 68 ans prenait du warfarine (un anticoagulant) pour une fibrillation auriculaire. Elle prenait aussi 1 000 mg d’huile de poisson par jour, pensant que c’était bon pour son cœur. Son médecin ne lui avait jamais demandé. Un jour, elle a eu une hémorragie interne. L’huile de poisson à cette dose augmente le risque de saignement. Si elle avait déclaré ce complément, son dosage de warfarine aurait été ajusté. Elle aurait évité l’hôpital.

Un autre cas : une femme de 45 ans est décédée d’une insuffisance hépatique aiguë. Elle prenait du kava pour l’anxiété, et un antipsychotique. Personne ne savait qu’elle prenait le kava. L’autopsie l’a révélé. Ce n’était pas une erreur médicale. C’était une erreur de communication.

Les patients dont les médecins posent des questions sur les compléments obtiennent des notes de satisfaction de 4,7 sur 5. Ceux dont les médecins ne les posent pas : 3,2 sur 5.

Que faire maintenant ?

Voici un plan simple, à appliquer dès aujourd’hui :

  1. Prenez 10 minutes pour lister tout ce que vous prenez : médicaments sur ordonnance, en vente libre, vitamines, minéraux, herbes, tisanes, extraits, probiotiques, et même les gélules de « bien-être » que vous achetez en ligne.
  2. Sur chaque produit, notez le nom exact, la dose, la fréquence et la raison.
  3. Apportez cette liste à votre prochain rendez-vous - même si vous ne vous sentez pas malade.
  4. Posez la question : « Est-ce que ce que je prends peut interagir avec mes autres médicaments ? »
  5. Si votre médecin ne vous demande jamais, dites-le-lui : « Je prends des compléments. Je veux m’assurer qu’ils sont sûrs avec mes traitements. »

Les outils qui peuvent vous aider

- My Dietary Supplement and Medicine Record (NIH) : le modèle officiel, gratuit, en français sur certains sites de santé publique.

- Application Medisafe ou MyTherapy : permettent de scanner les étiquettes, de suivre les prises, et d’envoyer un résumé à votre médecin par e-mail.

- Pharmacie de quartier : demandez à votre pharmacien de faire un « audit de médicaments » - c’est gratuit et rapide.

Groupe de personnes dans une salle d'attente présentant leurs listes de suppléments à un médecin.

Les pièges à éviter

  • Ne dites pas « je prends des vitamines » - précisez lesquelles et combien.
  • Ne pensez pas que « naturel » = « sûr » - le ricin est naturel. Il est aussi mortel.
  • Ne supposez pas que votre médecin sait - il ne le sait pas, à moins que vous le lui disiez.
  • Ne changez pas vos doses sans consulter - surtout si vous avez une maladie chronique.

Et si vous êtes déjà dans une situation à risque ?

Si vous avez récemment eu une réaction étrange - fatigue intense, nausées, douleurs au foie, saignements inhabituels - et que vous prenez des compléments, parlez-en dès maintenant. Ne patientez pas. Les interactions peuvent se manifester des semaines après le début du traitement.

Certains compléments sont particulièrement dangereux avec certains médicaments :

  • St. John’s Wort + antidépresseurs, contraceptifs, médicaments du VIH → perte d’efficacité
  • Chardon-Marie + médicaments du foie → risque de surcharge hépatique
  • Curcuma + anticoagulants → risque de saignement
  • Coenzyme Q10 + warfarine → réduction de l’effet anticoagulant
  • Kava + antipsychotiques → insuffisance hépatique
Ces combinaisons sont documentées, prévisibles, évitables. Mais seulement si vous parlez.

Dois-je déclarer les vitamines que je prends quotidiennement ?

Oui, absolument. Même les vitamines comme la B12, la D ou le fer peuvent interagir avec vos médicaments. Par exemple, la vitamine K réduit l’effet des anticoagulants comme le warfarine. La vitamine D en forte dose peut augmenter le risque d’hypercalcémie chez les personnes prenant des diurétiques. Ne les considérez pas comme « inoffensives » - elles sont des substances actives.

Mon médecin ne me pose jamais la question. Dois-je l’obliger à le faire ?

Vous n’avez pas à l’obliger - mais vous avez le droit de le demander. Dites simplement : « Je prends des compléments alimentaires, et je voudrais m’assurer qu’ils ne posent pas de risque avec mes traitements. » C’est votre droit à la sécurité. Un bon professionnel de santé accueillera cette demande avec gratitude, pas avec frustration.

Les compléments vendus en pharmacie sont-ils plus sûrs que ceux achetés en ligne ?

Pas nécessairement. Les produits vendus en ligne peuvent être falsifiés, contaminés, ou contenir des doses inconnues. Mais même ceux en pharmacie ne sont pas tous vérifiés. Le seul point commun : aucun ne doit être approuvé par la FDA avant la vente. La seule protection : la transparence. Vérifiez les étiquettes, notez les noms exacts, et parlez-en à votre pharmacien.

Comment savoir si un complément contient un ingrédient dangereux ?

Lisez la liste des ingrédients. Si vous ne reconnaissez pas un nom - comme « ashwagandha » ou « bacopa » - cherchez-le sur le site du NIH Office of Dietary Supplements. Il propose des fiches d’information gratuites sur plus de 80 compléments. Si vous trouvez un ingrédient qui interagit avec un de vos médicaments, ne l’arrêtez pas tout de suite : parlez-en à votre médecin. Il peut vous aider à trouver une alternative plus sûre.

Est-ce que les compléments sont réglementés en France ?

Oui, mais différemment qu’aux États-Unis. En France, les compléments alimentaires sont régis par l’ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire), qui fixe des limites pour certains ingrédients (comme la caféine ou la vitamine A). Mais contrairement aux médicaments, ils ne doivent pas prouver leur efficacité ni leur sécurité avant d’être vendus. Le contrôle se fait après coup, sur la base des signalements d’effets indésirables. C’est pourquoi votre déclaration est essentielle : elle fait partie du système de surveillance.

Prochaines étapes

Si vous prenez un seul complément, faites-le dès maintenant : écrivez-le sur un bout de papier. Nom exact. Dose. Fréquence. Raison. Montrez-le à votre médecin la prochaine fois. Ce n’est pas une formalité. C’est une mesure de sécurité. Et si vous êtes déjà dans un suivi médical, demandez à votre pharmacien de vérifier vos interactions. Cela prend 10 minutes. Ça peut vous sauver la vie.